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  le blog proustpourtous

Les réflexions d'une proustienne sur sa vie, et en quoi elle lui rappelle dans des épisodes du quotidien des passages de "A la recherche du temps perdu"

Un sommeil tourmenté; A tormented sleep

Publié le 25 Septembre 2014 par proust pour tous

Un sommeil tourmenté; A tormented sleep

Le sommeil, Edouard Vuillard, musée d'Orsay

J'ai mal dormi: ma hanche me fait souffrir, et plus grave mon amie Nicole est à l'hôpital. C'est quand on perd quelque chose (le sommeil), qu'on commence à y penser.

Ce qu'on aurait fait le jour, il arrive en effet, le sommeil venant, qu'on ne l'accomplisse qu'en rêve, c'est-à-dire après l'inflexion de l'ensommeillement, en suivant une autre voie qu'on n'eût fait éveillé. La même histoire tourne et a une autre fin. Malgré tout, le monde dans lequel on vit pendant le sommeil est tellement différent, que ceux qui ont de la peine à s'endormir cherchent avant tout à sortir du nôtre. Après avoir désespérément, pendant des heures, les yeux clos, roulé des pensées pareilles à celles qu'ils auraient eues les yeux ouverts, ils reprennent courage s'ils s'aperçoivent que la minute précédente a été toute alourdie d'un raisonnement en contradiction formelle avec les lois de la logique et l'évidence du présent, cette courte « absence » signifiant que la porte est ouverte par laquelle ils pourront peut-être s'échapper tout à l'heure de la perception du réel, aller faire une halte plus ou moins loin de lui, ce qui leur donnera un plus ou moins « bon » sommeil. Mais un grand pas est déjà fait quand on tourne le dos au réel, quand on atteint les premiers antres où les « autosuggestions » préparent comme des sorcières l'infernal fricot des maladies imaginaires ou de la recrudescence des maladies nerveuses, et guettent l'heure où les crises remontées pendant le sommeil inconscient se déclencheront assez fortes pour le faire cesser. Le côté de Guermantes

I slept badly, a pain from my hip, and more serious, my friend Nicole has been hospitalized. It's when one looses something (sleep) that one starts to think of it.

What one has meant to do during the day, as it turns out, sleep intervening, one accomplishes only in one’s dreams, that is to say after it has been distorted by sleep into following another line than one would have chosen when awake. The same story branches off and has a different ending. When all is said, the world in which we live when we are asleep is so different that people who have difficulty in going to sleep seek first of all to escape from the waking world. After having desperately, for hours on end, with shut eyes, revolved in their minds thoughts similar to those which they would have had with their eyes open, they take heart again on noticing that the last minute has been crawling under the weight of an argument in formal contradiction of the laws of thought, and their realisation of this, and the brief ‘absence’ to which it points, indicate that the door is now open through which they will perhaps be able, presently, to escape from the perception of the real, to advance to a resting-place more or less remote on the other side, which will mean their having a more or less ‘good’ night. But already a great stride has been made when we turn our back on the real, when we reach the cave in which ‘auto-suggestions’ prepare — like witches — the hell-broth of imaginary maladies or of the recurrence of nervous disorders, and watch for the hour at which the storm that has been gathering during our unconscious sleep will break with sufficient force to make sleep cease. The Guermantes Way
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