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  le blog proustpourtous

Les réflexions d'une proustienne sur sa vie, et en quoi elle lui rappelle dans des épisodes du quotidien des passages de "A la recherche du temps perdu"

MOLIÈRE par PROUST

Publié le 16 Janvier 2022 par proust pour tous

Pour l'anniversaire de Molière, né il y a 400 ans, en cette année anniversaire de Proust, mort il y a 100 ans, j'ai recherché dans A la recherche du temps perdu, les passages où l'auteur de théâtre est cité (voir par exemple l'index à la fin de l'édition de la Pléiade), Ce petit exercice m'a rappelé que la 1ère impression qui a suivi mon "syndrome de Stendhal" à la lecture de la Recherche a été: "Je comprends enfin à quoi sert la culture". Quelques exemples: 

Tout d'abord une petite scène qui me servira dans LE PETIT PAN DE MUR JAUNE, car c'est une scène muette, ce qui allègera une succession de dialogues parfois indigestes (on en a eu la preuve au café de la mairie jeudi dernier). Je situerai la rencontre devant la Vue de Delft.

A Balbec:

À la fin, nous aussi, nous fîmes une relation, malgré mais par ma grand-mère, car elle et Mme de Villeparisis tombèrent un matin l'une sur l'autre dans une porte et furent obligées de s'aborder non sans échanger au préalable des gestes de surprise, d'hésitation, exécuter des mouvements de recul, de doute et enfin des protestations de politesse et de joie comme dans certaines scènes de Molière où deux acteurs monologuant depuis longtemps chacun de son côté à quelques pas l'un de l'autre, sont censés ne pas s'être vus encore, et tout à coup s'aperçoivent, n'en peuvent croire leurs yeux, entrecoupent leurs propos, finalement parlent ensemble, le choeur ayant suivi le dialogue, et se jettent dans les bras l'un de l'autre. A l'ombre des jeunes filles en fleurs.

Une réplique de la grand-mère:

« J'ai entendu toute la conversation entre la “marquise” et le garde, me dit-elle. C'était on ne peut plus Guermantes et petit noyau Verdurin. Dieu ! qu'en termes galants ces choses-là étaient mises. » Et elle ajouta encore, avec application, ceci de sa marquise à elle, Mme de Sévigné : « En les écoutant je pensais qu'ils me préparaient les délices d'un adieu. »

Voilà le propos qu'elle me tint et où elle avait mis toute sa finesse, son goût des citations, sa mémoire des classiques, un peu plus même qu'elle n'eût fait d'habitude et comme pour montrer qu'elle gardait bien tout cela en sa possession.  Le côté de Guermantes (allusion à un vers du Misanthrope dit par Philinte)

A une fête chez la princesse de Guermantes:

On entendait, dominant toutes les conversations, l'intarissable jacassement de M. de Charlus, lequel causait avec Son Excellence le duc de Sidonia, dont il venait de faire la connaissance. De profession à profession, on se devine, et de vice à vice aussi. M. de Charlus et M. de Sidonia avaient chacun immédiatement flairé celui de l'autre, et qui, pour tous les deux, était dans le monde d'être monologuistes, au point de ne pouvoir souffrir aucune interruption. Ayant jugé tout de suite que le mal était sans remède, comme dit un célèbre sonnet, ils avaient pris la détermination, non de se taire, mais de parler chacun sans s'occuper de ce que dirait l'autre. Cela avait réalisé ce bruit confus, produit dans les comédies de Molière par plusieurs personnes qui disent ensemble des choses différentes. Sodome et Gomorrhe

Et dans "le dîner à la Raspelière", que la petite troupe joue régulièrement au café de la Mairie:

 J'objectai qu'à Combray le curé nous avait appris souvent des étymologies intéressantes. « Il était probablement mieux sur son terrain, le voyage en Normandie l'aura dépaysé. – Et ne l'aura pas guéri, ajoutai-je, car il était arrivé neurasthénique et est reparti rhumatisant. – Ah ! c'est la faute à la neurasthénie. Il est tombé de la neurasthénie dans la philologie, comme eût dit mon bon maître Pocquelin. Dites donc, Cottard, vous semble-t-il que la neurasthénie puisse avoir une influence fâcheuse sur la philologie, la philologie une influence calmante sur la neurasthénie, et la guérison de la neurasthénie conduire au rhumatisme ? – Parfaitement, le rhumatisme et la neurasthénie sont deux formes vicariantes du neuro-arthritisme. On peut passer de l'une à l'autre par métastase. – L'éminent professeur, dit Brichot, s'exprime, Dieu me pardonne, dans un français aussi mêlé de latin et de grec qu'eût pu le faire M. Purgon lui-même, de moliéresque mémoire ! À moi, mon oncle, je veux dire notre Sarcey national… » Mais il ne put achever sa phrase. Le professeur venait de sursauter et de pousser un hurlement : « Nom de d'là, s'écria-t-il en passant enfin au langage articulé, nous avons passé Maineville (hé ! hé !) et même Renneville. » Il venait de voir que le train s'arrêtait à Saint-Mars-le-Vieux où presque tous les voyageurs descendaient.  Sodome et Gomorrhe

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L
Je reprends le dernier mot entendu, à la fin de l'évocation des petits pans lumineux dans toute la Recherche, "Bravo!". J'ajoute : MERCI À TOUS;
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