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  le blog proustpourtous

Les réflexions d'une proustienne sur sa vie, et en quoi elle lui rappelle dans des épisodes du quotidien des passages de "A la recherche du temps perdu"

Proust pour tous: parler lentement. Speaking slowly

Publié le 15 Janvier 2011 par laurence grenier

 Je me demande ce que signifie la lenteur avec laquelle certaines personnes s'expriment.

I wonder why some people speak very slowly.

 

 

A ce moment le repas fut interrompu par un convive que j’ai oublié de citer, un illustre philosophe norvégien, qui parlait le français très bien mais très lentement, pour la double raison, d’abord que, l’ayant appris depuis peu et ne voulant pas faire de fautes (il en faisait pourtant quelques-unes), il se reportait pour chaque mot à une sorte de dictionnaire intérieur; ensuite parce qu’en tant que métaphysicien, il pensait toujours ce qu’il voulait dire pendant qu’il le disait, ce qui, même chez un Français, est une cause de lenteur. C’était, du reste, un être délicieux, quoique pareil en apparence à beaucoup d’autres, sauf sur un point. Cet homme au parler si lent (il y avait un silence entre chaque mot) devenait d’une rapidité vertigineuse pour s’échapper dès qu’il avait dit adieu. Sa précipitation faisait croire la première fois qu’il avait la colique ou encore un besoin plus pressant.

 

Sodome et Gomorrhe, II, II

 

 

 At this moment the meal was interrupted by one of the party whom I have forgotten to mention, an eminent Norwegian philosopher who spoke French very well but very slowly, for the twofold reason that, in the first place, having learned the language only recently and not wishing to make mistakes (he did, nevertheless, make some), he referred each word to a sort of mental dictionary, and secondly, being a metaphysician, he always thought of what he intended to say while he was saying it, which, even in a Frenchman, causes slowness of utterance. He was, otherwise, a charming person, although similar in appearance to many other people, save in one respect. This man so slow in his diction (there was an interval of silence after every word) acquired a startling rapidity in escaping from the room as soon as he had said good-bye. His haste made one suppose, the first time one saw him, that he was suffering from colic or some even more urgent need.

 

Translated by C.K. Scott Moncrieff

 

 

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