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  le blog proustpourtous

Les réflexions d'une proustienne sur sa vie, et en quoi elle lui rappelle dans des épisodes du quotidien des passages de "A la recherche du temps perdu"

PAR CŒUR au PALAIS ROYAL: un exemple d'apprentissage (laborieux)

Publié le 12 Décembre 2022 par proust pour tous

mon document de travail que je balade partout même dans un tout petit sac

I LE CHOIX: Pourquoi cette fable de La Fontaine ?

En souvenir de mon père qui connaissait beaucoup de textes par coeur, et en particulier des phrases à structures 17 ème, dont celle-ci que j'avais eu du mal à apprendre, il y a quelques années, mais dont je me dis: "J'ai la base, je vais apprendre ce qu'il y a au-dessus"; 

   Le vent redouble ses efforts,
            Et fait si bien qu'il déracine
Celui de qui la tête au ciel était voisine,
Et dont les pieds touchaient à l'empire des morts. (fin)

II LE COMMENCEMENT: premier obstacle, tout de suite franchi:

Je récite: Le Chêne dit un jour au roseau : corrigé aisément en Le Chêne un jour dit au roseau

III PATATRA, JE TOMBE SUR L'OS:
Vous avez bien sujet d'accuser la Nature:

ni sujet ni accuser n'accroche. il ne me reste que Nature. Je fais appel à SOS Ghassan, qui me donne son conseil: 

 

Ghassan Daouk

Eh oui Laurence Grenier certaines phrases font de la résistance !
La difficulté avec La Fontaine c'est souvent la forme de la phrase, forme que l'on n'emploie plus aujourd'hui. Retenir le sens n'est pas d'un grand secours dans le cas présent. Essayez de faire travailler la mémoire visuelle et la mémoire auditive.
par exemple : pour apprendre " Vous avez bien sujet d'accuser la nature "
Écrire sur une feuille blanche la phrase avec des trous:
_ _ _ _ d'accuser la nature
Dire à haute voix:
le Chêne dit un jour au Roseau: d'accuser la nature
Répéter
Ajouter en écrivant "sujet" le dire et le répéter
Écrire "bien"...et ainsi de suite jusqu'à vous avez.
On apprend donc en remontant la phrase à l'envers
Ainsi on stimule plusieurs entrées dans la mémoire et retient plus facilement ces formes inusitées et poétiques.
Attention! Cette astuce n'est nullement garantie sans souffrance 😄

ça y est, je l'ai: quand je commence Vous avez bien... tout le reste de la ligne se met en rang sans que je pense même au sens.

IV ENCORE UN OBSTACLE:

Un Roitelet  pour vous est un pesant fardeau.
            Le moindre vent qui d'aventure
            Fait rider la face de l'eau,
            Vous oblige à baisser la tête :
Cependant que mon front, au Caucase pareil,
Non content d'arrêter les rayons du soleil,
            Brave l'effort de la tempête.

Le roitelet n'est pas pour moi un pesant fardeau, il apparait aussitôt que j'arrive à sa hauteur. Tout glisse, vais-je apprendre le reste de la fable sans trop d'efforts? NON, à 4 heures du matin je me réveille en sursaut: quel est le verbe juste avant l'effort (que j'avais dompté assez rapidement, au début je disais l'effet, quelle imbécile je fais !): Combat ? Bat ? je suis sûre que ça commence par un B. Il faut que je me lève pour trouver mon carnet (je crois même, à tort, que le mot se trouve juste au-dessus de la spirale), je réveille mon jules. On parle de sa famille, dispute, je finis par lui dire: "on arrête c'est plus malin de penser à ce qu'on apprend par coeur plutôt que de penser à la famille (un précepte que j'ai suivi toute ma vie, avec quelques effets dévastateurs)". Je découvre mon mot, c'était pourtant évident.

V UN VERS QUI ME REMONTE DU PASSÉ, sans encombre:

Tout vous est aquilon ; tout me semble zéphir

VI LE RESTE COULE

Encor si vous naissiez à l'abri du feuillage
            Dont je couvre le voisinage,
            Vous n'auriez pas tant à souffrir :
            Je vous défendrais de l'orage ;
            Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent. 
La Nature envers vous me semble bien injuste.
 Votre compassion, lui répondit l'Arbuste ,
Part d'un bon naturel ; mais quittez ce souci.
     Les vents me sont moins qu'à vous redoutables. 
Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu'ici
            Contre leurs coups épouvantables
            Résisté sans courber le dos ;
Mais attendons la fin. Comme il disait ces mots,
Du bout de l'horizon accourt avec furie
            Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût porté jusque-là dans ses flancs.
            L'Arbre tient bon ; le Roseau plie.

VII MAIS QUAND LE DIRAI-JE SANS LA MOINDRE HÉSITATION ? 

Pas demain, j'en ai peur mais je mettrai ma défaillance sur le dos du froid (que je combattrai avec un thermos de vin chaud)

A demain, le mardi 13 décembre, à 18 h ! Car "qu'il fasse beau, qu'il fasse laid, c'est mon habitude d'aller sur les SIX heures du soir, me promener au Palais-Royal" 

 

Le narrateur lui aussi se débattait avec sa mémoire, qu'il avait meilleure que la mienne, comme lorsqu'il alla écouter la Berma jouer Phèdre:

Je gagnai ma place, tout en cherchant à retrouver un vers de Phèdre dont je ne me souvenais pas exactement. Tel que je me le récitais, il n'avait pas le nombre de pieds voulu, mais comme je n'essayai pas de les compter, entre son déséquilibre et un vers classique il me semblait qu'il n'existait aucune commune mesure. Je n'aurais pas été étonné qu'il eût fallu ôter plus de six syllabes à cette phrase monstrueuse pour en faire un vers de douze pieds. Mais tout à coup je me le rappelai, les irréductibles aspérités d'un monde inhumain s'anéantirent magiquement ; les syllabes du vers remplirent aussitôt la mesure d'un alexandrin, ce qu'il avait de trop se dégagea avec autant d'aisance et de souplesse qu'une bulle d'air qui vient crever à la surface de l'eau. Et en effet cette énormité avec laquelle j'avais lutté n'était qu'un seul pied. Le côté de Guermantes

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