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  le blog proustpourtous

Les réflexions d'une proustienne sur sa vie, et en quoi elle lui rappelle dans des épisodes du quotidien des passages de "A la recherche du temps perdu"

PROUST À L'ÉCOLE 4 : Comment trouver l'inspiration ?

Publié le 5 Octobre 2019 par proust pour tous in Proust à l'école

Laurent Angard, professeur de 3ème au collège Lamartine, Bischheim (67)

 

Donner envie de lire À la recherche du temps perdu de Marcel Proust à des collégiens de 3ème

Le projet : Se chercher, se construire, se raconter, se représenter

Problématique : « Chaque lecteur est, quand il lit, le propre lecteur de soi-même » (Proust) ou comment l’œuvre de Marcel Proust peut-elle nous apprendre à comprendre la vie et à réfléchir sur elle ?

Comment trouver l’inspiration ?

Lisez le texte suivant :

 

 

 

Observez et aidez-vous simplement des questions pour dégager l’intérêt du texte :

  1. Quel pronom personnel est le plus employé ? À quel genre littéraire cet extrait pourrait-il vous faire penser ?
  2. De quoi se souvient le narrateur dans cet extrait ? Quel sens est alors utilisé ?
  3. Ce souvenir est-il un souvenir proche ? Trouvez un indice qui confirme votre réponse.
  4. Quels sont les temps dominants dans cet extrait ? Aux lignes 1 et 2, on en trouve un autre : lequel ? À quel moment de l’écriture fait-il référence ?
  5. Quel mode reconnaissez-vous dans « j’entendisse », « je n’eusse pas » (référez-vous à la séance précédente)
  6. Expliquez : « d’avoir conscience de moi, puisque cet instant ancien tenait encore à moi »
  7. Quel genre de réflexions le souvenir provoque-t-il chez le narrateur ?
  8. En quelques mots, résumez la pensée du narrateur.

Compétence du socle visée :

  • Lire, comprendre et interpréter des textes littéraires en fondant l’interprétation sur quelques outils d’analyse simples.

 

  1. Prendre garde à bien conjuguer les verbes et à modifier ce qui doit l’être
  • Récrivez le passage suivant à la 3e personne du singulier.

« Pour tâcher de l’entendre de plus près, c’est en moi en moi-même que j’étais obligé de redescendre. C’est donc que ce tintement y était toujours ; […] Quand il avait tinté j’existais déjà et, depuis, pour que j’entendisse encore ce tintement il fallait qu’il n’y eût pas eu discontinuité… »

  • Complétez le texte ci-dessous avec la terminaison adéquate de l’infinitif ou de l’imparfait

« Françoise, son valet de pied, le maître d’hôtel entend…. les coups de sonnette non comme un appel et sans song… à venir, mais pourtant comme les premiers sons des instruments qui s’accordent quand un concert va bientôt recommenc… et qu’on sent qu’il n’y aura plus que quelques minutes d’entr’acte. Aussi quand, les coups commençant à se répét… et à devenir plus insistants, nos domestiques se mett…. à y prendre garde et estimant qu’ils n’avaient plus beaucoup de temps devant eux et que la reprise du travail ét… proche, à un tintement de la sonnette un peu plus sonore que les autres, ils pouss… un soupir et, prenant leur parti, le valet de pied descend… fum… une cigarette devant la porte »

Marcel Proust, Le Côté de Guermantes, partie 1

Compétence du socle :

  • Maitriser le fonctionnement du verbe et son orthographe.
  • Mobiliser en réception et en production de textes les connaissances linguistiques permettant de construire le sens d’un texte, son rapport à un genre littéraire ou à un genre de discours.

 

  1. Partager mes réactions, mes sentiments
  • Écrivez quelques lignes et cherchez un vocabulaire précis pour évoquer :
  1. Un tintement de cloche qui évoque une situation d’enfance (vous pouvez partir d’un autre son)
  2. Un coucher de soleil au bord de la mer qui vous émeut par sa beauté
  3. L’arrivée dans un endroit que vous aimez

Compétence du socle :

  • Savoir analyser en contexte l'emploi d'unités lexicales, identifier un réseau lexical dans un texte ; en percevoir les effets.
  • Communiquer par écrit et sur supports variés un sentiment, un point de vue, un jugement argumenté en tenant compte du destinataire et en respectant les principales normes de la langue écrite.

Voici un autre extrait d’un grand écrivain, François-René de Chateaubriand (1768-1848), que Proust avait lu (dans Les Jeunes filles en fleurs, le narrateur dit à Mme de Villeparisis : « Souvent le jour était tombé avant que nous fussions de retour. Timidement je citais à Mme de Villeparisis en lui montrant la lune dans le ciel, quelque belle expression de Chateaubriand ou de Vigny, ou de Victor Hugo. »)

*

**

« Hier au soir je me promenais seul ; le ciel ressemblait à un ciel d'automne ; un vent froid soufflait par intervalles. À la percée d'un fourré, je m'arrêtai pour regarder le soleil : il s'enfonçait dans des nuages au-dessus de la tour d'Alluye. […]

      Je fus tiré de mes réflexions par le gazouillement d'une grive perchée sur la plus haute branche d'un bouleau. À l'instant, ce son magique fit reparaître à mes yeux le domaine paternel. J'oubliai les catastrophes dont je venais d'être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j'entendis si souvent siffler la grive. Quand je l'écoutais alors, j'étais triste de même qu'aujourd'hui. Mais cette première tristesse était celle qui naît d'un désir vague de bonheur, lorsqu'on est sans expérience ; la tristesse que j'éprouve actuellement vient de la connaissance des choses appréciées et jugées. Le chant de l'oiseau dans les bois de Combourg m'entretenait d'une félicité que je croyais atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rappelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité insaisissable. »

Dans Mémoires d’outre-tombe, 1848-1850

Après avoir lu l’extrait, formulez dans un court paragraphe les points communs avec le texte de Marcel Proust (vous pouvez réutiliser les mots : souvenir, inspiration, sentiments, etc.)

Compétence du socle :

  • Formuler par écrit sa réception d’une œuvre littéraire ou artistique.

L’avis de Sébastien Baudoin Docteur en littérature et professeur de Lettres, spécialiste de Chateaubriand.

Ce passage des Mémoires de Chateaubriand est emblématique du fonctionnement de la mémoire qui est commun à Proust : un petit détail (le chant subtil d’une grive*) entraîne un bouleversement énorme (la prise de conscience du temps passé à l’aune du présent dans un commun constat désespéré de la fuite des souvenirs). La fugacité du chant renvoie à la fuite du souvenir et à celle du temps qui passe. L’événement, ténu, a simplement permis cette brusque prise de conscience. En cela, cet épisode marque un tournant dans le rapport entre la littérature et le temps, thème promis à une grande fortune par la suite.

 *Une grive

 

 

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