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  le blog proustpourtous

Les réflexions d'une proustienne sur sa vie, et en quoi elle lui rappelle dans des épisodes du quotidien des passages de "A la recherche du temps perdu"

Dire sans parler; Say it without a word

Publié le 1 Décembre 2014 par proust pour tous

Dire sans parler; Say it without a word

Dans mon livre"les 7 leçons de Marcel Proust", une des citations concerne Françoise qui est au service du narrateur et sait lui "dire sans parler", je viens de trouver un autre exemple de cette habitude qu'elle avait de s'exprimer devant ses maîtres:

Je ne me demandais plus ce qui avait pu mettre Albertine en retard, et quand Françoise entra dans ma chambre me dire : « Mademoiselle Albertine est là », si je répondis sans même bouger la tête, ce fut seulement par dissimulation : « Comment mademoiselle Albertine vient-elle aussi tard ! » Mais levant alors les yeux sur Françoise comme dans une curiosité d'avoir sa réponse qui devait corroborer l'apparente sincérité de ma question, je m'aperçus, avec admiration et fureur, que, capable de rivaliser avec la Berma elle-même dans l'art de faire parler les vêtements inanimés et les traits du visage, Françoise avait su faire la leçon à son corsage, à ses cheveux dont les plus blancs avaient été ramenés à la surface, exhibés comme un extrait de naissance, à son cou courbé par la fatigue et l'obéissance. Ils la plaignaient d'avoir été tirée du sommeil et de la moiteur du lit, au milieu de la nuit, à son âge, obligée de se vêtir quatre à quatre, au risque de prendre une fluxion de poitrine. Aussi, craignant d'avoir eu l'air de m'excuser de la venue tardive d'Albertine : « En tout cas, je suis bien content qu'elle soit venue, tout est pour le mieux », et je laissai éclater ma joie profonde. Elle ne demeura pas longtemps sans mélange, quand j'eus entendu la réponse de Françoise. Celle-ci, sans proférer aucune plainte, ayant même l'air d'étouffer de son mieux une toux irrésistible, et croisant seulement sur elle son châle comme si elle avait froid, commença par me raconter tout ce qu'elle avait dit à Albertine, n'ayant pas manqué de lui demander des nouvelles de sa tante. « Justement j'y disais, monsieur devait avoir crainte que mademoiselle ne vienne plus, parce que ce n'est pas une heure pour venir, c'est bientôt le matin. Mais elle devait être dans des endroits qu'elle s'amusait bien car elle ne m'a pas seulement dit qu'elle était contrariée d'avoir fait attendre monsieur, elle m'a répondu d'un air de se fiche du monde : « Mieux vaut tard que jamais ! » Et Françoise ajouta ces mots qui me percèrent le coeur : « En parlant comme ça elle s'est vendue. Elle aurait peut-être bien voulu se cacher mais... » Sodome et Gomorrhe

I just found an example of Françoise able to tell her displeasure without a word:

I no longer asked myself what could have made Albertine late, and, when Françoise came into my room to inform me: “Mademoiselle Albertine is here,” if I answered without even turning my head, that was only to conceal my emotion: “What in the world makes Mademoiselle Albertine come at this time of night!” But then, raising my eyes to look at Françoise, as though curious to hear her answer which must corroborate the apparent sincerity of my question, I perceived, with admiration and wrath, that, capable of rivalling Berma herself in the art of endowing with speech inanimate garments and the lines of her face, Françoise had taught their part to her bodice, her hair — the whitest threads of which had been brought to the surface, were displayed there like a birth-certificate — her neck bowed by weariness and obedience. They commiserated her for having been dragged from her sleep and from her warm bed, in the middle of the night, at her age, obliged to bundle into her clothes in haste, at the risk of catching pneumonia. And so, afraid that I might have seemed to be apologising for Albertine’s late arrival: “Anyhow, I’m very glad she has come, it’s just what I wanted,” and I gave free vent to my profound joy. It did not long remain unclouded, when I had heard Françoise’s reply. Without uttering a word of complaint, seeming indeed to be doing her best to stifle an irrepressible cough, and simply folding her shawl over her bosom as though she were feeling cold, she began by telling me everything that she had said to Albertine, whom she had not forgotten to ask after her aunt’s health. “I was just saying, Monsieur must have been afraid that Mademoiselle was not coming, because this is no time to pay visits, it’s nearly morning. But she must have been in some place where she was enjoying herself, because she never even said as much as that she was sorry she had kept Monsieur waiting, she answered me with a devil-may-care look, ‘Better late than never!’” And Françoise added, in words that pierced my heart: “When she spoke like that she gave herself away. She would have liked to hide what she was thinking, perhaps, but. . . . ” Cities of the Plain
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