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La plage de Fécamp, Albert Marquet
Lundi soir, à l'université populaire de Fécamp, grâce à Annick qui vient d'emménager dans cette ville qui m'a beaucoup plu (surtout le rivage, sa mer et son ciel changeant de tons à vitesse V). Le pays des peintres impressionnistes, le pays de Maupassant. Une conférence générale sur mon aventure proustienne, organisée par la très dynamique et aimable Ginou. 55 personnes, après une visite de la ville, conduite par Annick, et agrémentée d'une dégustation de Bénedictine, dans le musée de la fabrique, (avec madeleine parfumée d'épices que je ne reconnus pas, une des meilleures que j'aie jamais goûtée). A la fin au moment des dédicaces de mes "12 dîners de Marcel Proust", une femme dans l'assistance, proustienne à n'en pas douter, me confie qu'elle possède un bateau, le bateau, le seul au monde qui ait été enregistré sous le nom d'ELSTIR, grand peintre de la recherche, parce que certaines de ses toiles ne montrent pas immédiatement la différence entre terre et mer.
Mais les rares moments où l'on voit la nature telle qu'elle est, poétiquement, c'était de ceux-là qu'était faite l'oeuvre d'Elstir. Une de ses métaphores les plus fréquentes dans les marines qu'il avait près de lui en ce moment était justement celle qui, comparant la terre à la mer, supprimait entre elles toute démarcation. C'était cette comparaison, tacitement et inlassablement répétée dans une même toile, qui y introduisait cette multiforme et puissante unité, cause, parfois non clairement aperçue par eux, de l'enthousiasme qu'excitait chez certains amateurs la peinture d'Elstir. C'est par exemple à une métaphore de ce genre – dans un tableau, représentant le port de Carquethuit, tableau qu'il avait terminé depuis peu de jours et que je regardai longuement – qu'Elstir avait préparé l'esprit du spectateur en n'employant pour la petite ville que des termes marins, et que des termes urbains pour la mer. Soit que les maisons cachassent une partie du port, un bassin de calfatage ou peut-être la mer même s'enfonçant en golfe dans les terres ainsi que cela arrivait constamment dans ce pays de Balbec, de l'autre côté de la pointe avancée où était construite la ville, les toits étaient dépassés (comme ils l'eussent été par des cheminées ou par des clochers) par des mâts, lesquels avaient l'air de faire des vaisseaux auxquels ils appartenaient quelque chose de citadin, de construit sur terre, impression qu'augmentaient d'autres bateaux, demeurés le long de la jetée, mais en rangs si pressés que les hommes y causaient d'un bâtiment à l'autre sans qu'on pût distinguer leur séparation et l'interstice de l'eau, et ainsi cette flottille de pêche avait moins l'air d'appartenir à la mer que, par exemple, les églises de Criquebec qui, au loin, entourées d'eau de tous côtés parce qu'on les voyait sans la ville, dans un poudroiement de soleil et de vagues, semblaient sortir des eaux, soufflées en albâtre ou en écume et, enfermées dans la ceinture d'un arc-en-ciel versicolore, former un tableau irréel et mystique. A l'ombre des jeunes filles en fleurs
Monday night, at the université populaire de Fécamp, thanks to Annick who just moved to this town that I loved (in particular its shore, its sea and sky that changed colors at great speed). Impressionists' country, Maupassant's country. My lecture was made of a general presentation of my proustian adventure. It was organized by the very dynamic and likable Ginou. 55 people were present, after a visit of the town with Annick (and a visit at the Benedictine museum and tasting of the liquor wearing that name, with a madeleine flavored with special spices, one of the best I ever tasted) At the end, during a signing of my new book "12 dîners de Marcel Proust", a woman told me that she was the proud owner of the only boat named ELSTIR, the great painter of The Search, because in some of his paintings you could not differentiate sea from earth.